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Le lièvre, symbole de l’ouverture

P
our nombre de nemrods, l’ouverture de la chasse est synonyme de quête du lièvre. Mais est-ce vraiment le cas, et est-il pertinent de le chasser en septembre ? 

Le lièvre, quel que soit le surnom qu’on lui donne, bouquin, rouquin, capucin, oreillard, lebre, fait partie de ces espèces emblématiques dont la conquête est, pour beaucoup de chasseurs, vécue comme un rite initiatique. On se souvient toujours avec émotion de son premier bouquin. Et le permis en poche, beaucoup de novices ne se sentent pleinement chasseur, qu’une fois leur premier lièvre au carnier. 

De multiples surnoms 

 Si l’espèce se porte globalement bien et a supporté les bouleversements agricoles de ces dernières décennies, à l’inverse des perdrix et lapins, il n’en est pas moins soumis à de nombreux périls qui, localement, peuvent entrainer d’importantes fluctuations de populations. C’est d’ailleurs une des caractéristiques de l’espèce que d’être soumis à des variations très importantes de ses effectifs sur un territoire donné.  

Lièvre

Le renard n’est pas le moindre des prédateurs du lièvre, mais dans ce cas goupil sait que, repéré par le lièvre, il est illusoire d’espérer le capturer. Il passera donc son chemin. 

La prédation est l’un des premiers facteurs à limiter l’abondance de l’espèce. Le renard est le premier responsable, et les suivis effectués par les fédérations de chasseurs montrent bien une corrélation entre les abondances relatives de ces deux espèces. Quand la population de renards augmente, celle des lièvres diminue, et inversement. 

Le renard, son principal prédateur 

Mais d’autres prédateurs peuvent avoir un impact non négligeable. Nous songeons aux corneilles qui, au printemps, peuvent opérer des coupes dans les effectifs des jeunes levrauts. Le lièvre est aussi une espèce soumise à de nombreuses maladies (tularémie, EBHS, coccidiose) qui parfois anéantissent en quelques semaines les efforts de gestion consentis par les chasseurs.  

Des lièvres

Bien que sensible au machinisme agricole, c’est néanmoins dans les grandes plaines céréalières qu’on observe les densités les plus importantes, parfois supérieures à 3 lièvre à l’hectare à l’ouverture ! 

Et bien évidemment pour une espèce très inféodée aux milieux agricoles, les pratiques culturales jouent beaucoup sur sa démographie. Si les remembrements ont peu affecté le lièvre, ce dernier se satisfaisant même plutôt bien des immenses espaces en quasi-monoculture, il souffre en revanche de l’évolution du machinisme agricole. Plus que le recours à des produits phytosanitaires, dont l’usage tendrait plutôt à se raisonner, l’emploi d’engins de travail du sol, ou de récolte, de plus en plus grands et rapides, a clairement un effet négatif sur l’espèce.  

Plus abondant en milieu ouvert 

Mais le lièvre a cette qualité fondamentale qu’il n’est pas besoin de connaitre de fortes densités pour le chasser dignement. Ce n’est pas un gibier qui flatte le chasseur par le beau tir. Oserions-nous même dire que son tir n’a que peu d’intérêt. Ce n’est souvent que l’épilogue d’une action de chasse, pour laquelle, contrairement au perdreau ou la bécasse par exemple, la difficulté du tir est accessoire. La quête importe bien plus que la conclusion. Et s’il est amusant de le chasser devant soi, que ce soit sans chien en s’en remettant à sa lecture du paysage, ou avec un chien d’arrêt ou un broussailleur, le lièvre reste l’animal idéal pour la chasse aux chiens courants. 

La quintessence de la chasse aux chiens courants 

Sa capacité à ruser devant les chiens en fait la quintessence de l’exercice, qu’il s’agisse de chasse à tir où de vénerie. D’ailleurs la vénerie du lièvre est la plus dynamique puisqu’un tiers des veneurs la pratique, loin devant celle du lapin (23%), ou même du sanglier (11%). Si l’on tire à l’occasion un lièvre, est que la chose est plaisante, la chasse de cette espèce prend réellement tout son sens lorsqu’elle repose entièrement sur le chien. Aussi peut-on s’interroger sur la pertinence de le chasser en septembre, quand les chaudes journées de fin d’été contrarient la voie du lièvre, et ne facilitent pas le travail des chiens. 

Lièvre Fuyant

Tantôt fuyant, tantôt rusant, le lièvre comble le chasseur aux chiens courants, pour peu que la superficie du territoire l’autorise à découpler ses chiens. 

De plus, à cette période certaines hases allaitent parfois encore une dernière portée. Et nombre de gestionnaires recommandent de s’abstenir de tirer l’espèce avant octobre. Il en retourne du libre arbitre de chacun, et depuis que les plans de chasse ou de gestion sont quasi-généralisés, il n’y a pas à craindre que la chasse fragilise l’espèce. 

Une espèce bien gérée 

 Aussi que vous choisissiez de lever le fusil ou de presser la queue de détente, le lièvre est le gibier symbole de l’ouverture générale que l’on aura toujours plaisir à dégîter en ce jour où tout devient possible.  

Les chasseurs

Là où il abonde, le capucin est aussi parfois chassé en battue, ce qui a défaut de mobiliser de grandes qualités de chasse, peut constituer un joli spectacle.